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Gianni : “Don Toliver a écouté ce que je faisais, et il a aimé”

Le jeune rappeur de Romainville, Gianni revient avec un projet 12 titres des plus complets du nom de “23 : Bilan de vie”. Un projet qui a suscité beaucoup de questionnements lors de l’annonce d’un featuring assez particulier sur la tracklist : celui de Don Toliver.

Nous avons eu la chance de rencontrer le rappeur pour parler de sa musique, de sa vision et de cette collaboration des plus surprenantes.

Tu as été révélé avec ta série de freestyle Dose De Moi en 2018, peux tu nous expliquer le concept et d’où il vient ?

J’avais sorti plusieurs singles avant et on cherchait un concept fort pour assoir les bases de mon univers et du message que je voulais apporter à ma musique. Sachant que je me livre beaucoup dans ma musique, et que mon univers s’est encré autour de la rue et ses aléas, on a essayé de faire ressortir tous ces éléments sur un format court et efficace.
C’est Berdy mon manager et Sacha mon producteur qui ont eu l’idée de mettre en scène à chaque fois un client différent qui vient m’acheter une dose comme personnage principal de chaque vidéo. Même si ça s’appelle “Dose De Moi”, le récit de mes chansons parle de moi et ce que je vis avec les gens qui m’entourent, ces gens-là font aussi partie de mon histoire.

Comme tu l’as dit tu n’es pas le personnage principal dans ces freestyles alors que c’est bien toi qui rappe, pourquoi ce choix ?

Dans ma musique je me considère surtout comme une voix mais les histoires que je porte auraient pu être racontés et vécus par n’importe qui. J’pense que les histoires qu’on vit dans la cité sont assez similaires du coup plusieurs personnes peuvent se reconnaitre dans mes sons. Je pense que c’est plus dans le ressenti que les choses sont différentes et la manière dont ces histoires impactent ta vie.

C’est pour ça que mon visage n’est pas au cœur des vidéos, on peut partager des histoires communes mais venir de toute horizon.

Aujourd’hui, le monde de la rue semble être le centre névralgique de ton art, comment penses-tu que cette vie a influencé ta musique ?

Quand tu grandis dans la rue, avec ses bons et ses mauvais côtés, tu te forges un caractère et une histoire. Cette histoire qui inclut principalement la tienne mais aussi celle des gens qui t’entourent, si je n’aurais pas été avec telle ou telle personne peut-être que je ne serai pas là aujourd’hui. Donc dans ma musique, je parle de ce je vis et ce que j’observe.

Le quotidien à la cité n’est pas toujours rose, et c’est ces moments-là qui ont marqué ma vie que je rap. Je n’essaie pas spécialement de faire passer un message mais plus des émotions.

Est ce que tu considères que ce besoin de faire passer un message fait de ton rap quelque chose de plus proche de l’ancienne école du rap français ?

À vrai dire, je ne réfléchis pas à savoir si je suis plus proche de l’ancienne où de la nouvelle école. On a ressenti les choses de cette manière et c’est ce qui nous a paru important à raconter alors on l’a fait comme ça simplement.

Mais effectivement on est forcément un peu inspiré par les choses qui ont été faites avant nous, même si c’est inconsciemment.

Tu as expliqué en 2019 que tu avais pris un “mauvais virage” aux alentours de tes 13 ans, qu’est ce qu’il s’est passé à ce moment là ?

Disons que à 13 ans t’arrives à un âge où tu commences à comprendre certaines réalités que tu ne captais pas forcément jusque-là. Quand il se passe des choses un peu dangereuses ou malsaines à cet âge tu réagis à l’instinct et avant même que tu t’en rendes compte t’as déjà pris le mauvais virage.

Se souvenir de son chemin c’est quelque chose d’important pour avancer.

– Gianni

Gianni interview

Ce mauvais virage a t’il apporté des remords ou des regrets dans ta vie par la suite ?

Non pas du tout, on croit en Dieu et donc chaque chose n’arrive pas par hasard, c’est qu’il fallait qu’elles arrivent.

Il y a un sentiment de mélancolie assez fort dans ta musique, tu sais d’où il te viens ?

La rue est un contexte de vie propice à la mélancolie mais il me vient aussi de ma vie avant la rue quand je vivais au Congo…

..Tu penses souvent au passé ? 

Ouais. T’es obligé d’y penser souvent pour ne pas oublier les erreurs que tu as commises dans ta vie et les leçons qu’elles ton apportées, se souvenir de son chemin c’est quelque chose d’important pour avancer.

C’était qui les artistes que t’écoutais le plus avant de passer de l’autre côté de la plume ?

J’écoutais du rap français. Sefyu, Booba, Rohff, Mac Tyer. Je suis congolais, donc on a toujours un peu écouté la musique de chez nous depuis petit.

Par contre assez peu de rap US à cause de la barrière de la langue. Les sons qui me touchaient le plus c’était les sons mélancoliques déjà à l’époque, ceux qui racontaient une histoire ( My Life de Lil Wayne). C’est ceux-là que je préfère.

Don Toliver a écouté ce que je faisais, et il a aimé.

– Gianni

Gianni interview

Ton nouveau projet s’appelle “23 : Bilan de vie”, c’est déjà l’heure pour toi de faire un bilan ?

Bah ouai ! Y a énormément de choses qui se sont passées en peu de temps.
Je suis né à Kinshasa (RDC) et j’ai grandi là-bas, après je suis venu en France assez jeune.

Le fait de revenir des années plus tard pour clipper “Enfant du pays” m’a fait réaliser pas mal de choses. Depuis qu’on est petit on ne prend pas forcément le temps de prendre du recul. On se dit qu’on doit avancer encore et encore. Mais quand je suis revenu au bled j’ai pris une claque.

J’ai encore de la famille au Congo, du coup quand je les ai revus je me suis dit poser plusieurs questions : « Quel est le bilan de toute ces années loin des siens ? Comment changer les choses ? Quel impact a eu ces années-là sur ma vie sur mon avancé ? C’est à partir de ce sentiment que j’ai eu le besoin de faire le bilan sur tout ce qui est arrivé avant cette prise de conscience…

Un des faits les plus surprenant de ce nouveau projet c’est ton featuring avec le petit protégé de Travis Scott : Don Toliver sur “De La Hoya”, comment est né cette collaboration ?

Ça date de fin 2018/début 2019. À ce moment, il n’était pas forcément aussi côté qu’aujourd’hui. C’est mon producteur Sacha qui avait son contact. Il m’a fait écouter le gars, j’ai kiffé, je me suis dit qu’il pouvait rajouter quelque chose à ce que je fais musicalement parlant. Pour les échanges ça se passe surtout entre les équipes des différents labels. Don Toliver a écouté ce que je faisais, et ça l’a branché.

On a tout fait à distance, ensuite j’ai fait ma partie au studio, on lui a envoyé et il a joué le jeu à fond, on est super content du résultat.

Comment vis-tu l’exposition que tout le projet “Gianni” est en train de prendre, toi qui a un caractère plutôt discret à la base ?

Moi personnellement, je reste moi-même mais ça fait toujours bizarre de rencontrer de nouvelles personnes qui s’intéressent à toi, à ta vie et ton histoire sachant que de base je suis assez réservé. Mais en règle générale il y a pleins de choses qui n’ont pas changées. Je vis toujours dans mon quartier, je traine toujours avec les mêmes gars. Je reste moi-même de toute façon et je ne calcule pas trop…

Je crois que je ne réalise pas forcément encore tout ce qui se passe, le parcours paraît long mais une fois que tu regardes derrière toi, c’est allé super vite…

C’est quoi le morceau que tu conseilles pour quelqu’un qui veut te découvrir ?

Le morceau qui représente au mieux mon univers sur le dernier projet c’est « Pénombre », j’y décris assez bien ma mélancolie.

Pour ceux qui voudraient aller plus loin après je leur conseille d’écouter le projet “Géhenne” et évidemment “23 : Bilan de vie” le dernier en date.

Coté Rio est mon premier titre que j’ai clippé avec Daymolition, c’est assez coté ego-trip, un style d’écriture que j’affectionne toujours mais qui correspond moins à ma proposition musicale d’aujourd’hui.
Aujourd’hui ma musique a pris en profondeur.

Merci beaucoup Gianni, on se retrouve bientôt pour un nouveau bilan ?

Fort ! Je suis déjà en train d’enregistrer la suite de mon côté. Merci à vous pour l’interview.

L’album “23 : Bilan de Vie” de Gianni est disponible sur Apple Music, Spotify et Deezer.

Images : Larry Kiloso