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Kalash Criminel : “Je pensais que l’Élysée avait autre chose à faire que de s’occuper de moi”

À l’orée de la sortie de son troisième projet, nous nous sommes entretenu avec Kalash Criminel. Le rappeur nous parle de ses goûts partagés pour la scène américaine, la construction difficile de ce nouvel opus et l’ensemble des featuring qui l’entoure. À seulement 23 ans, Kalash Criminel espère rentrer dans une nouvelle ère avec cet album qui concrétise enfin toute les attentes qui se sont construites autour de lui.

Comment ça a vraiment commencé pour toi le rap ?

Depuis tout petit je suis un vrai fan de rap, j’écoutais tout ce qui me passait sous la main. En cinquième, j’ai enregistré mon premier freestyle et il a fait le tour du collège. Toute l’école l’avait et j’ai commencé à poser des freestyles à la récré. Je ne comprenais pas vraiment que ça commençait à prendre de l’ampleur à l’époque. Un an plus tard je refais un autre freestyle, cette fois-ci tout le monde le met en sonnerie et ça a encore pris une autre dimension. Après ça j’ai sorti mon premier son en solo qui s’appelait Traumatisé et c’est à partir de 2013 que je m’y suis vraiment mis sérieusement avec Hall 14.

Quels rappeurs t’ont poussé à écrire tes premières lignes au collège ?

Il y a vraiment 3 rappeurs qui m’ont inspiré : Lino, Kery James et Despo Ruti. J’essayais d’écouter tout le monde de La Fouine, Booba en passant par Rohff, mais j’ai eu différente période. Au collège c’était beaucoup de rap américain et au lycée j’ai switché vers le rap français.

Et aujourd’hui qui est-ce que tu écoutes dans le rap américain ?

Musicalement, cette nouvelle génération je la trouve vraiment forte, mais leur comportent je trouve que c’est vraiment pas sérieux. Lil Pump par exemple je peux pas le blairer, il fait du bon son, mais humainement c’est un cas. 6ix9ine par contre je le trouve plus intéressant, c’est un vrai troll qui s’assume sur toute la scène rap. Le seul américain que j’écoute vraiment c’est Kodak Black aujourd’hui, ZEZE je l’ai saigné. C’est le seul que je valide.

 

“Le seul américain que j’écoute vraiment c’est Kodak Black” – Kalash Criminel

 

Kalash Criminel aka Amira Kiziamina, né le 14 février 1995 à Sevran en Seine-Saint Denis. ©WAVE

 

La Fosse Aux Lions c’est ton troisième projet, qu’est ce qui a changé dans ton quotidien depuis tes deux premiers ?

Tout a changé. J’ai même plus le temps de me poser au quartier comme avant. Je n’achète plus rien, on m’offre tout. Par contre je traîne toujours avec des gens que je connais depuis longtemps et je suis constamment en contact avec mes parents. Ça me permet de ne pas prendre la grosse tête et de ne pas oublier d’où je viens. Mon enfance au Congo me revient tout le temps en tête et je ne peux pas oublier cette période.

Tu parles souvent de ton pays natal dans tes textes, est-ce que c’est important pour toi de rapper sur l’histoire du Congo ?

Oui parce qu’en France on ne parle pas beaucoup du Congo, car le pays a été colonisé par les Belges. J’ai vécu pendant plusieurs années là-bas et il s’y passe des choses vraiment très graves. C’est un pays de 80 millions d’habitants, la majorité vit dans la misère et ça me touche beaucoup.

Comment pourrais-tu définir la couleur de cet album ?

J’ai fait en sorte qu’il y ait vraiment de tout dans cet album. Il y a évidemment des morceaux très agressifs comme Cougar Gang, mais il y a aussi des tracks qui parlent un peu plus d’amour. « Ça va ma chérie » c’est un petit son où je parle des relations homme femme sur de la grosse trap. Je ne traîne plus tous les jours à la cité donc je ne peux plus la raconter comme il y a 2 ou 3 ans.

Tu as eu des problèmes avec Cougar Gang, ton label l’a fait retirer de ton album, qu’est-ce que ça te fait qu’un morceau de rap sorte du monde de la musique ?

Franchement ça me fait de la promo. Si tu écoutes bien il y a rien de directement insultant pour Brigitte Macron dans mon refrain. Je pensais que l’Élysée avait autre chose à faire que de s’occuper de moi. Je ne suis pas le premier rappeur à dire des choses comme ça et les autres n’ont jamais eu de problème. Sarkozy a pris vraiment cher, Chirac c’est pareil et ça tombe sur moi. Ça me fait quand même chier que le morceau ne soit pas sur l’album parce qu’il est vraiment fort et que c’est en train de devenir un classique.

 

“Je pensais que l’Élysée avait autre chose à faire que de s’occuper de moi” – Kalash Criminel

 

 

 

Tu as justement déclaré que la Fosse Aux Lions serait un classique, c’est quoi pour toi la définition d’un classique dans le rap ?

Pour moi c’est un album intemporel, dans 50 ans on en parlera encore et il aura toujours du sens. Quand je réécoute des sons de Despo à l’ancienne c’est comme si je les écoutais pour la première fois. C’est ça un classique.

Tu l’as construit dans quelles conditions cet album ?

Il a été fait dans des conditions vraiment extrêmes. Au niveau de l’humain et du business ça a été très compliqué. J’ai perdu des amis, des contrats, j’ai l’impression d’avoir vécu que des problèmes. Avec du recul maintenant je me dis que si je n’avais pas vécu tout ça je n’aurais pas fait le même album. Je lisais plein de choses sur Twitter, « Kalash c’est un effet de mode, c’est fini ». Ces attaques sur les réseaux sociaux ça m’a vraiment remotivé. Quand je suis dos au mur, c’est là que je suis le plus fort.

Les featuring sont très hétérogènes sur la tracklist, est-ce que ça t’a aidé pour faire cet album ?

Oui ça m’a vraiment ouvert à d’autres sonorités. Vald, Soolking, Gradur, Douma ils ont tous leur délire et c’est pour leur personnalité que je les ai invité. L’album était bouclé depuis juillet, j’avais une quarantaine de sons, mais tous en solo. À partir de ce moment, je me suis concentré sur les feat et c’est là que l’album a vraiment commencé à prendre du caractère.

 

“Dans 5 ans je pense que je serai rappeur et producteur” – Kalash Criminel

 

 

Est-ce que tu peux nous parler de l’entourage qui t’a aidé à faire cet album ?

À part Chance Beat et Boomin, je me suis entouré d’une toute nouvelle équipe. Quand une prod me parle, même si c’est un gosse de 10 ans qui a pu la faire je la prends. C’est vraiment à l’instinct. Pour ce projet j’ai dû recevoir 10000 prods, j’ai pu en écouter que 3000. Les producteurs ont vraiment fait le taf parce qu’ils sentaient qu’il se passait un truc.

Tu as invité Bigflo et Oli dans Tête Brûlé, pourquoi être aller les chercher alors qu’ils sont à l’opposé de ton délire ?

Je les ai rencontrés à l’époque de Musique Nègre, ils sont venus vers moi pour me complimenter sur mon travail. Ça m’a fait vraiment plaisir, je suis allé écouter leur album et ce qu’ils racontent m’as beaucoup parlé. Je leur ai fait une petite dédicace dans le morceau et ils ont tourné le début du clip de leur côté dans le Sud. Ils sont dans le monde réel, moi je suis plus dans le ghetto, ce n’est pas forcement le même rap, mais on pourrait clairement faire un truc ensemble. La musique est universelle et je pourrai faire un vrai truc avec Bigflo et Oli, c’est des bons gars.

Où est-ce que tu te vois dans 5 ans ?

Dans 5 ans je pense que je serai rappeur et producteur. J’ai envie de prendre sous mon aile un rappeur que j’aime beaucoup et le faire percer avec moi. Aujourd’hui, je m’en sens capable et avec mon label c’est complètement possible. Dans 5 ans on se revoit pour interviewer mon rappeur, vous avez pas intérêt à faire les morts.