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Yvnnis, hors de l’ombre

En seulement cinq ans, le rappeur Yvnnis a réussi à devenir un nom qui compte sur la nouvelle scène rap français. Rencontre à l’occasion de la sortie de sa mixtape DND, pour parler de son parcours et de son ouverture musicale.

Do Not Disturb. Alors qu’il retrousse la manche de son pull, Yvnnis affiche cette phrase écrite en noir sur tout son avant-bras gauche. Un tatouage réalisé l’année dernière, qui a aussi fini par inspirer le nom de sa dernière mixtape : DND.

“Je me suis fait ce tatouage il y a deux ans, et je ne sais plus pourquoi, mais on en parlait avec mon producteur Lil Chick. On cherchait à ce moment un nom, et il m’a dit d’appeler ma mixtape comme ça”.

Sur la pochette de son nouveau disque sorti en octobre (shootée par Léa Esmaili) on le retrouve ainsi assis seul dans le coin d’une pièce, dans un ensemble vert de la tête aux pieds, regard tourné ailleurs. Comme si il n’était pas vraiment là.

“Je trouvais que ça représentait plutôt bien notre équipe. On reste relativement entre nous, on est presque un peu sectaires. Et on n’aime pas être dérangés”.

Depuis son émergence au début de l’année 2022, Yvnnis cultive autant la discrétion qu’il aime occuper l’espace musicalement. Malgré quatre années de carrière, quatre mixtapes, deux EPs, ainsi qu’une Cigale et un Olympia remplis, le rappeur commence seulement aujourd’hui à prendre la parole dans les médias :

“Ce n’était pas une volonté d’être silencieux à la PNL, ça ne me pose pas de soucis de faire des interviews, affirme-t-il. C’est juste que je trouvais que je n’avais pas grand chose à dire avant ça. Je voulais un peu attendre pour engranger un peu d’expérience, avant de raconter des choses.”

En moins de cinq ans, celui qui a grandi à Fontenay-Sous-Bois a ainsi eu le temps de vivre assez de choses pour devenir un nom qui compte dans la nouvelle génération du rap français. Autant aguerri au micro lorsqu’il faut faire preuve de technique, qu’à l’aise pour chanter des refrains autotunés, le rappeur a ainsi su montrer en seulement quelques années que la polyvalence faisait partie de sa personnalité.

“Je ne me sens pas enfermé musicalement dans une scène rap en particulier. Je pourrais feater avec plein d’artistes qui n’ont rien à voir avec ce que je fais. C’est important pour moi de montrer que je suis ouvert musicalement”.

Exigence et ouverture 

Une décomplexion musicale qui vient sans doute de son cadre familial : né d’un père fan de jazz et d’artistes africains comme Richard Bona, et d’une mère amatrice de rap, le Fontenaysien grandit entre deux mondes musicaux. À la fois bercé par Pat Metheny et La Fouine, Yvnnis va de son côté vivre son premier coup de cœur personnel avec La Sexion D’Assaut

L’École des Points Vitaux est le premier album qui m’a vraiment marqué. Pour ma génération ça a été super important”. Sans doute que l’essai inaugural du groupe parisien a influé sur son envie de se mettre à rapper, un jour par hasard avec des amis du collège.

“J’étais en troisième ou en quatrième, et on avait écrit un texte en cours pour rigoler. J’avais grave kiffé, et je me suis mis à écrire dans mon coin chez moi, sans le montrer à personne. Jusqu’à ce que je trouve ça assez bien.”

Cette passion ne va ensuite plus jamais le quitter et prendre encore une autre dimension. Notamment grâce à une rencontre : alors qu’il utilise une de ses productions disponibles sur internet, Yvnnis entre en contact autour de 2020 avec Lil Chick. Jeune producteur à l’époque basé à Reims, on lui doit aujourd’hui une bonne partie de la musique de NeS ainsi que de Yvnnis, ou plus récemment des titres avec la chanteuse espagnole Judeline.

Le contact passe très vite entre le rappeur et le producteur, qui vont alors entrer en collaboration étroite et bâtir ensemble les fondements de la musique de Yvnnis : technique et exigeante sur l’écriture et les placements, mais ouverte musicalement. Un travail de fond qui se ressentira sur leurs premières sorties ensemble, à l’image des EPs PARHELIA (2022) puis NOVAE (2023), sur lequel le Fontenaysien ira même jusqu’à rapper sur un morceau drum’n’bass avec “HÉROS”.

Sur la scène de la Cigale en février 2024, Yvnnis lance “VIN ITALIEN”, son premier tube – bientôt certifié single d’or – avec, autour de lui, une nuée de drapeaux, sa clique sur scène, et une fosse de 1400 personnes. Après seulement quelques sorties et plusieurs années de travail, le rappeur a déjà réussi à faire complet à la Boule Noire puis à La Cigale en un an top chrono.

“J’ai vraiment compris la bascule avec cette date-là” se souvient-il. “La salle était six ou sept fois plus grande que mon premier concert parisien. Quand j’ai vu tous ces gens qui étaient là pour moi, je me suis vraiment dit que c’était fou”.

Quelques mois plus tard, c’est cette fois-ci l’Olympia et sa devanture aux lettres rouges que le rappeur investira. Avant de repartir ouvrir un nouveau chapitre musical.

Plus de collaborations

Après une mixtape (L’AFRO OU LES TRESSES), un EP d’été (SCORE!) et une année de tournée en 2024, Yvnnis a dû penser la suite de sa musique en se posant une question : que voulait-il maintenant faire ? De retour en studio avec Lil Chick, le rappeur va alors prendre une décision : se laisser porter et enregistrer tout ce qu’il veut.

De ce mantra va ainsi naître DND : une nouvelle sortie de treize titres dont l’appellation “mixtape” prend tout son sens. “Je faisais de la musique en fonction de ce que j’écoutais, et surtout j’enregistrais des morceaux qui me faisaient kiffer. Le projet s’est construit comme ça, et je trouve que c’est aujourd’hui celui qui représente le mieux ce que je sais faire” appuie-t-il.

À la fois rappé, chanté, mélodieux, mais aussi incisif, cette nouvelle sortie ose aller vers plusieurs territoires sans s’éparpiller. “Il y en a pour tout le monde et ça représente chaque aspect musical de ce que j’aime bien faire. Je chante, je rappe, c’est un bon juste milieu”. 

Une sortie qui s’est aussi accompagnée d’un travail visuel important, à l’image des quatre clips qui illustrent jusqu’ici la mixtape, en mélangeant souvent images réelles, glitchs, VFX,  effets visuels, et personnages en 3D.

“L’aspect visuel, c’est quelque chose qui me tient à cœur. Tu ne peux pas le négliger dans notre société actuelle. C’est plus facile de faire connaître ta musique si les visuels sont beaux. Donc on essaye toujours d’allier les deux”.

Yvnnis sait de quoi il parle : son morceau “Gare du Nord” a en effet été énormément relayé fin 2024 pour son clip – impressionnant – par Ferina, dans lequel des centaines d’images en stop motion et des plans alternant images de gare et utilisation de pièces de petit trains  s’alternaient.

Au point de remporter un UK Video Music Award, et comptabiliser 2 millions de vues sur YouTube : “L’ampleur que ce clip a pris nous a vraiment surpris. Mais ça a été un travail de fou. Une dizaine de personnes a travaillé en continu pendant trois semaines sur la post prod du clip”.

Aujourd’hui sûre de ses acquis et de son ouverture musicale, Yvnnis regarde maintenant 2026 avec la volonté d’aller encore plus loin dans ses expérimentations, tout en s’ouvrant aussi au reste de la scène actuelle.

Lorsqu’on lui demande ses envies pour les prochains mois, la réponse est nette : “J’ai envie de continuer à m’amuser, et j’aimerais commencer à faire plus de collaborations”.

Il continue : “Avant, j’aimais bien faire de la musique dans ma chambre. À l’heure actuelle ce n’est plus trop ce que je veux. Je suis plus dans une optique de faire des sessions et rencontrer d’autres artistes, partager nos visions de la musique sur un son, et faire des choses qui font kiffer les gens. J’ai peu fait de collaborations jusque-là et c’est pourtant ce que je préfère faire”.

Le Yvnnis discret et dans son coin de la pochette de DND semble donc de plus en plus prêt à s’ouvrir aux autres. Pour s’amuser, et montrer au reste du monde l’étendue de ses capacités.

Production : WAVE® Studio – 2025
Réalisateurs : Romain Negrichi & Lucas Martinez (@evil.wayz & @donk_vhx)
DOP : Antoine Methot (@blackhusky701)
Gaffer : Mehdi Carpentier (@mehdi.carpentier)
Edit : Romain Negrichi (@evil.wayz)
Color grading : Lucas Martinez (@donk_vhx)
Styliste : Rudy Tohouri Gbapa (@larsontop)
Interview : Brice Bossavie (@bricebossavie)
Remerciement à  Mecanicus (@mecanicus_)